Je veux vous faire partager l'analyse d'un militant du genre humain. Cette contribution concerne le suicide répété d'Amérindiens de Guyane alors que l'un des plus grands parcs au monde par rapport à la superficie du territoire est en activité et devrait faciliter l'existence de ceux qui y vivent. La longueur de cette contribution ne devrait pas représenter un obstacle tant le drame dont il s'agit défie l'entendement.
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Je ne peux rester insensible et inactif face au drame humain qui se déroule sous nos yeux depuis de trop longues années, le paroxysme étant atteint ces derniers mois avec la disparition de vies humaines et les nombreuses tragédies qui traduisent une violence sociale extrême.
A mon tour, je m’associe à cette volonté de dénouement rapide de ce phénomène de suicides collectifs individualisés qui s’exprime sans que l’on en connaisse véritablement toutes les causes, afin d’y apporter durablement les remèdes sociaux et médicaux.
Afin d’apporter très modestement ma contribution personnelle, j’ai consulté le rapport d’activité 2009 du Parc amazonien de Guyane (PAG).
Le Parc amazonien de Guyane, établissement public créé par décret ministériel du 27 février 2007, est managé par un directeur nommé par l’Etat. Un conseil d’administration composé de 44 membres répartis en trois collèges, un conseil scientifique et un comité de vie locale doivent veiller à la mise en force de cet outil de protection de la biodiversité sur un territoire de plus de deux millions d’hectares. Les communes de Maripasoula, Papaïchton, Camopi, Saül et Saint-Elie sont concernées administrativement par l’établissement public.
Le budget 2009 s’établit à la somme de 11.602.543,99 €, dont 3.213.923,30 € pour le personnel (27,70 % du budget) et 162.006 € en études et recherche (1,4 % du budget). Le siège du Parc amazonien de Guyane situé à Rémire-Montjoly a coûté, quant à lui, 3.515.422,54 € (30,3 % du budget).
Le personnel, soit 80 agents, sont classés curieusement par leur résidence d’origine avant leur prise de poste avant le 31/12/2009, selon des critères qui ne sont pas définis dans le document.
Les événements marquants en 2009 ont été plusieurs séminaires et tables-rondes, des visites préfectorales, l’inauguration du siège du parc, un contrôle de la Cour des comptes et la mission d’évaluation du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) en décembre 2009, dont le rapport préconise :
« la construction d’une stratégie scientifique, la mise en place du système d’information géographique, de faire du parc le pivot de l’action des pouvoirs publics en faveur du développement durable et de la protection des communes de l’intérieur par une collaboration renforcée avec les services de l’Etat et les collectivités. Il préconise aussi de faire évoluer le management vers le mode projet pour améliorer le pilotage et la coordination des travaux d’élaboration de la charte » (p. 2).
Ce même document vise deux éléments clés qui nourrissent parallèlement ma réflexion d’élu local de proximité :
- la mise en place des conseils d’habitants, « lieux de dialogue avec le territoire »
- l’expertise juridique des arrêtés en vigueur régissant la zone d’accès règlementé instaurée depuis 1970.
Enfin, le rapport d’activité est émaillé de prises de vue photographiques, exercice de communication externe sous forme de « cartes postales ».
Mais alors, rien sur les problématiques humaines qui visent les populations de nos communes. Est-il besoin de rappeler ici que toutes nos collectivités connaissent ou ont connu la présence, parfois fortement marquée, de peuples amérindiens, quelles que soient leurs origines ethniques et géographiques ?
Dans la liste des actions du Parc amazonien de Guyane, le rapport s’étend sur la lutte contre l’orpaillage illégal (titre 2 : « Surveillance du territoire »), la découverte de nouvelles espèces animales et végétales (titre 3 : « Connaissance et étude des milieux naturels »), la sensibilisation aux déchets (titre 4 : « Développement local du territoire »).
Les aspects sanitaires et sociaux, l’urgence de la lutte contre les addictions (drogues et alcool), les problèmes médicaux (hospitalisation « à distance », obésité...), les grossesses précoces et toutes les formes de prostitution et d’agression sexuelle que l’on pourrait observer ne sont ni abordées ni même effleurées, ce qui laisse à supposer que les populations locales ne sont en attente que d’une concertation trop souvent creuse et inefficace, car non motivés par des objectifs clairement définis au préalable.
C’est ainsi que l’on pourrait observer que notre millefeuille administratif local s’est une nouvelle fois épaissi au grand bonheur d’une technostructure très éloignée des réalités du concret et du monde des vivants, d’autant plus que le centre décisionnel est lui-même situé sur la côte.
Dès lors, ne serait-il pas urgent que se réunisse l’Association des maires de Guyane en présence de toutes les autorités morales et spirituelles qui œuvrent sur le territoire afin de poursuivre l’analyse du rôle du Parc amazonien de Guyane, doté de puissants moyens et de levier administratifs, juridiques, techniques, humains et financiers, à l’instar du PAPA, grâce à sa localisation et sa taille et, ainsi, faire en sorte que cet outil replace l’Homme guyanais au centre de ses préoccupations stratégiques et de ses actions de terrain ?
De plus, pourquoi ne pas proposer qu’une mission d’inspection conjointe du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) à laquelle seraient associés nos deux parlementaires, sénateurs-maires, puisse venir sur place auditionner les principaux acteurs de terrain, maires, autorités morales et spirituelles, associations, afin de dégager des axes stratégiques de résolution de cette problématique de suicides collectifs individualisés sur le court, moyen et long terme ?
Enfin, n’est-il pas temps de poser clairement la gouvernance du Parc amazonien de Guyane à l’aune des réformes institutionnelles désormais en cours ?
Voilà ma contribution que je vous livre afin que notre collectivité guyanaise ne soit plus seulement le lieu de pâture des expériences uniques, mais surtout un exemple durable de Progrès, d’Avenir et de Partage pour tous ceux qui ont choisi d’y vivre.