Dans les trois précédentes parties j’ai fait un choix forcément subjectif sur mon approche du sens de l’existence, sur ma quête de la vérité. J’ai décidé d’opposer l’existentialisme Sartrien à l’essentialisme. J’ai opté pour l’existentialisme en le posant comme équation afin de le dépasser philosophiquement dans notre vécu au quotidien depuis des générations. Le Territoire et la Patrie ont été appréhendés sous cet angle pour mesurer le degré de soumission auquel nous sommes exposés. Mes réflexions trouvent ses racines dans les faits générés par notre société.
Cette quatrième partie clos ma réflexion sur la force qu’il nous est nécessaire d’avoir pour nous transformer si nous voulons métamorphoser la communauté humaine à laquelle nous appartenons. Elle met en exergue l’importance des mythes.
Le principe même de la colonisation est de détruire en premier ce qui se rapporte à l’esprit. Car, il est le premier outil de la résistance. Si nous prenons l’exemple de l’Egypte antique dont la civilisation remonte à la nuit des temps, on sait que les empereurs romains chrétiens, au 4ème siècle de notre ère, ont fait interdire sa religion basée sur le polythéisme en fermant le temple d’Isis à Philae. Cette religion qui n’a rien à voir avec le monothéisme organisait sur différents plans la vie quotidienne des égyptiens.
Les peuples qui ont résisté aux différentes agressions sont ceux qui ont en leur sein des représentants de leurs mythes et qui les utilisent pour expliquer l’état de la société et chercher ce qui a conduit à son déséquilibre. On en déduit que l’imaginaire dope les individus pour assurer la victoire du bien sur le mal ou tout simplement accepter leur coexistence éternellement. Je voudrais juste citer l’épopée de Gilgamesh et celle de la création quant à la civilisation mésopotamienne. Lorsque les Etats-Unis bombardent l’Irak sur un mensonge et que certains pays européens y participent c’est également la civilisation mésopotamienne que l’on tente de faire disparaître de la mémoire de l’humanité pour des raisons purement mercantiles. Un autre exemple est l’Iran qui n’a jamais été colonisé. L’Iran de l’Antiquité est la Perse. Son épopée de la création du monde est bâtie sur sept actes dont les êtres humains qui furent la sixième création et le feu la septième. Le Mythe apparaît donc comme nécessaire à l’être humain pour son équilibre et pour construire son destin.
Au-delà des réponses rationnelles de l’anthropologie, des réponses aussi rationnelles que la biologie tant moléculaire que cellulaire, il reste que l’interrogation de l’existence en général interpelle et particulièrement l’existence humaine. La recherche du sens de la vie, de la vérité, de la coexistence pacifique ne peut dépendre uniquement de la vision matérialiste et des théories mensongères du monde.
La cohérence des groupes humains relève d’un contexte culturel qui intègre la spiritualité, qu’elle soit laïque ou religieuse. Pour ma part, je fais le choix de la spiritualité laïque parce que je la conçois dépourvue de dogmes. La Guyane en tant qu’espace humain en Amérique du Sud, ne peut déroger à cette règle. Il nous revient la tâche de chercher à comprendre ce qui donne du sens à la communauté humaine à laquelle nous appartenons.
Notre première recherche consiste à savoir sur quels mythes est bâtie la société française. Force est de constater que les mythes français ressemblent davantage à des légendes de surcroît ethniques qu’à des mythes tels qu’on peut les concevoir par leur rôle à expliquer l’état du monde, de la société. La France étant une partie de l’Occident, on peut déduire qu’elle s’inscrit dans les mythes Gréco-Romains.
En quoi les mythes Gréco-Romains peuvent parler aux Amérindiens, aux Businengués, aux créoles ? Hormis l’intérêt intellectuel, l’intérêt du savoir et de la connaissance. Il nous faut admettre que nous n’avons pas de mythes sauf à considérer que nous sommes des assimilés et que cette opération d’assimilation est une réussite totale.
En quoi les mythes auraient un intérêt pour nous ? A vraiment réfléchir, ils susciteraient une adhésion collective plus forte. Comme tout mythe fondateur, il nous expliquerait les principes qui doivent orienter notre existence tout en nous révélant la part de nous-mêmes dont nous n’avons encore pas conscience. Puis, chaque fois que nous nous serions égarés, le mythe nous ramènerait au réel. Serions-nous capables de dire aujourd’hui, d’où nous venons, où sommes-nous et où voulons nous aller ?
Bien sûr, je n’invite pas à créer un mythe de la création, mais notre histoire aussi abominable fut-elle, aussi abjecte, aussi douloureuse a généré de surcroît une rupture avec notre passé. Il nous faut retrouver ce lien pour être plus fort dans notre tête comme certains initiés égarés ont pu retrouver «la parole perdue ».
L’histoire nous enseigne les différents mythes de l’humanité. Parmi eux, il y a bien un ensemble constitué en mythologie qui correspond à notre réalité. Entre ces mythologies, laquelle semble se rattacher à notre état ? La Mythologie Egyptienne, la Mythologie Gréco-Romaine, la Mythologie Japonaise, la Mythologie Nordique, la Mythologie Mésopotamienne, la Mythologie Perse.
Comme des adultes, nous avons à clarifier méthodiquement la manière dont nous concevons notre destin. Nous ne pouvons continuer à nous mobiliser pour sans cesse demander, sans cesse reprocher, sans cesse se plaindre. Le destin collectif se construit collectivement avec détermination et intelligence. Le destin se construit sur la durée et il ne dépend pas du calendrier des élections quand bien même nous ne devons pas négliger ces événements. (Fin)