En 1789, les paysans, jusqu’alors, sujets du roi, quasiment dociles, anesthésiés par la foi dispensée par le clergé, décident de changer leur existence. Cette prise de conscience du sens de la vie résulte du refus de la souffrance, du refus de l’humiliation, du refus de se considérer pauvre de la raison. Enfin, du refus de se comparer aux invertébrés. La révolte de ces êtres vivants a fait d’eux des humains. Ils venaient de faire un grand pas vers l’humanisme en refusant leur état de sujets du roi. L’homme de cette fin du 18ème siècle venait de choisir sa propre destination, il venait de se définir comme homme libre.
Comment comprendre qu’en cette deuxième décade de ce troisième millénaire, l’homme devenu citoyen puisse être à ce point soumis à la souffrance du libéralisme économique. Comment peut-il admettre que le chômage est une fatalité, que la crise de l’endettement soit une conséquence normale d’une bonne gestion… L’homme de ce 21ème siècle n’est-il plus capable de se projeter ? A-t-il perdu le sens des projets, est-il incapable de s’arracher à sa misère, à sa souffrance, à cette absurde vie qu’on lui destine ?
Je veux croire qu’il existe une majorité de citoyens capables de se dépasser car, seul l’homme doté de raison et d’intelligence peut donner à sa propre vie un sens, seul l’homme pourvu de sa liberté absolue de conscience peut refuser d’être un mort-vivant et accepter d’être en mesure de comprendre que la révolte, le combat, la désobéissance civile sont l’expression de l’intelligence et qu’ils constituent chacun, un des éléments de l’existence humaine.
Il en ressort que voter, cette nouvelle arme de la démocratie, c’est choisir son existence, c’est donc choisir ce que l’on veut être, un lâche ou un courageux, un acteur de son existence ou un larbin du système, c’est s’engager pour sa liberté. C’est aussi, faire le choix du contraire du dégoût de la vie, c’est faire le choix du chemin inverse du désoeuvrement, c’est faire le choix de la voie inverse de l’insécurité, c’est faire le choix du contraire du repli sur soi.
En cette période où les candidats promettent monts et merveilles, il y a bien un qui soit en mesure de proposer une existence qui soit en adéquation avec celle que l’on a pour rêve. Ceux qui souffrent ont acquis de l’expérience. Ils doivent être en état de distinguer celui qui les ressemble le plus et battre campagne pour qu’il soit l’élu de ceux qui ne veulent plus souffrir. L’existence, c’est notre libre engagement.