La forme républicaine de l’Etat français et l’attribut national de sa souveraineté appartient au peuple. C’est la conséquence essentielle de la révolution de 1789. Aucune corporation de métier ne peut prendre en otage la République même sur une partie du territoire que l’on peut considérer par les faits, comme désincarnée. Ainsi, lorsqu’une ressource est de nature telle, qu’elle peut paralyser le fonctionnement de la société, elle ne peut pas être entre les mains d’entrepreneurs privés. En Guyane l’activité du carburant longtemps hyper opaque, dans une configuration monopolistique, constitue une sorte de curseur de l’activité globale au gré des distributeurs de carburants confondus à des pétroliers. Le Conseil Régional de la Guyane, strate de l’Etat français, dans le cadre de la décentralisation, se prononce contre le décret de l’Etat auquel il appartient. Quel que soit l’angle dans lequel on peut se situer, autonomiste, indépendantiste, nihiliste, suiviste etc., la préoccupation de l’institution régionale est le bien-être du plus grand nombre. Cet affront fait au ministère des Outre-mer qui a l’écoute de l’exécutif mérite une attention particulière. C’est un vrai bras de fer qui lui est lancé non pas au nom du peuple mais, au nom d’une corporation. Pour le bien de la République, j’espère que ce défi sera pris à sa juste mesure.
Bien des faits nous ont montré le regard que portent certains, assimilés ; certains, aliénés ; certains, racistes ; certains, xénophobes, sur ceux qui représentent l’autorité de l’Etat en fonction de leur morphologie apparente. Le Ministre des Outre-mer est de l’Outre-mer. Certains ultramarins qui se seraient couchés en face d’une autre morphologie sentent qu’ils peuvent s’asseoir sur celui qui leur ressemble en apparence mais qui est plus cultivé qu’eux, qui a plus de caractère qu’eux, qui est plus compétent qu’eux. Le Ministre LUREL a dès le départ raison. Les distributeurs que l’on appelle improprement les pétroliers pensent qu’il n’y a aucune différence entre un gouvernement de Gauche et un gouvernement de droite. C’est la raison pour laquelle ils se sentent si puissants pour imposer leur diktat à la République, ils peuvent se permettre de quitter une réunion ministérielle avec fracas et menaces. Ils ont la même lecture de ce ministère que sous le gouvernement de droite de Monsieur Fillon lorsque le ministre de l’Outre-mer JEGO a été éliminé sans qu’il s’en rende compte, pour avoir simplement constaté que toutes les revendications du peuple n’étaient pas infondées. Si aujourd’hui, le ministre LUREL devait être désavoué par l’exécutif ce serait un échec patent pour la République elle-même, ce serait donner tort à la raison, ce serait faire des vices l’essence même de la société. Tous les discours sur la probité, sur la démocratie, sur la qualité des dirigeants politiques ne seraient qu’un leurre.
Je ne reviendrai pas sur la réalité des problèmes économiques des gérants de station. Mais, à vouloir "vaincre sans péril, on triomphe sans gloire". Les vrais problèmes des gérants de station sont les distributeurs. Pour s’en rendre compte il n’y a qu’à voir les contrats qui leur sont proposés, Il n’y a qu’à voir comment ils sont tenus. Actuellement, le non renouvellement de leur contrat pour des raisons propres aux distributeurs apparaît comme un déni de justice. Ils sont en grève actuellement pour un faux motif alors qu’ils auraient pu être indemnisés dans la mesure où, pour une fois ce sont les distributeurs qui refusent d’assurer la livraison de carburants. Ils donnent l’impression d’avoir décidé d’être le bras armé des distributeurs par frilosité. Les gérants de station en Guyane ne sont pas dans la même configuration que ceux des Antilles. Pour exemple, les stations des Antilles peuvent faire grève pour le carburant mais, peuvent tenir leur commerce ouvert. La structure commerciale n’est pas la même qu’en Guyane. Le commerce du magasin peut être aussi juteux que la vente de carburant ce qui est loin d’être le cas pour la Guyane.
Pour toute l’économie guyanaise, le carburant est trop cher. Hormis les communes frontalières comme Saint-Laurent du Maroni et Saint-Georges de l’Oyapock qui pourront bénéficier de carburants, cette grève va encore faire mal à l’économie et pénalise le plus grand nombre, c'est à dire ceux qui votent notamment pour les élections régionales et pour la prochaine consultation concernant la collectivité unique.
Il importe aujourd’hui de casser ce monopole, de permettre d’autres sources d'approvisionnement. Un territoire ne peut être à ce point entre les mains de personnes dont la seule perspective est leur intérêt personnel avec une ressource collective qui appartient à toute l’humanité. Il est indispensable que le ministre des Outre-mer tienne bon, qu’il affirme sa détermination, ses convictions et que les deux exécutifs au plus haut sommet de l'Etat, prennent toute la mesure de la situation afin de rendre cohérente l’organisation institutionnelle des territoires périphériques de l'Hexagone.