Autorisons nous, avec un peu de recul, à appréhender ce qui se passe dans la société guyanaise. Il apparaît que les consultations du 10 et 24 janvier 2010 auront une portée historique que beaucoup de nos contemporains n’arrivent pas à en prendre la mesure en raison de cette culture de l’immédiateté que nous avons dévelopée
L’Etat, par la question des deux consultations, ne souhaitait plus le statut quo. Si cette évidence n’est pas apparue à l’esprit de tous les électeurs (taux d’abstention), il n’en reste pas moins qu’il s’agit de la réalité. Plus de Département, plus de Région autrement dit, exit la région monodépartementale. C’était donc cela le vrai message.
Quel aurait été le résultat de la consultation si une troisième question avait été posée dans la formulation suivante : Désirez-vous maintenir la Guyane en tant que région monodépartementale relevant de l’article 73 ? Personne aujourd’hui ne peut dire avec certitude ce qu’aurait été le résultat… Mais, il y a fort à parier que le taux de participation serait proche de 80 % et que le taux d’abstention de 20% pour un résultat positif qui oscillerait les 72,58%. Hélas, elle n’a pas été posée.
Donc, l’enjeu consistait à choisir entre une collectivité territoriale dotée d’une certaine autonomie et régie par l’article 74 et une assemblée délibérante unique régie par l’article 73 sans transfert de compétences, étant entendu, par ailleurs, que celle-ci est vide de tout contenu.
Il y a un principe citoyen établi, acceptons-en l’augure, le peuple s’est exprimé, faisons lui allégeance quand bien même la vérité sur l’expression pour cette consultation du 24/01 serait l’abstention (72,58%).
Quel type de cobaye ?
Il est un fait certain, qu’avec l’assemblée délibérante unique, le département et la région disparaissent. Cela restitue le fait que c’est improprement que l’on parle de fusion de ces deux collectivités puisqu’il n’y a pas de contenu dans l’assemblée unique. Rien n’oblige l’Etat, lors des débats, de faire état du contenu des deux collectivités disparues. Cette collectivité unique est inédite et elle peut avoir son propre contenu. La première désinformation a été celle qui a conduit à dire, sur les media qu’elle est créée par une loi ordinaire. Ceci est contraire à la constitution. Les différents textes qui s’y rapportent font état d’une loi organique. A charge de prouver le contraire, sinon les textes de la constitution ne sont pas clairs.
En ce sens, la Guyane est en situation "d’essai clinique" avec 72,58% d’abstention. Cela ressemble presque aux essais cliniques qui se font pendant les guerres contre la volonté des personnes. Elle est donc un cobaye avec tous les risques que cela comporte. Là où cela est grave pour la société guyanaise, c’est qu’elle est en phase pré clinique et clinique en même temps. Autrement dit, elle a tout à perdre et particulièrement à cause des « effets indésirables » de cette nouvelle organisation institutionnelle.
Le promoteur, acteur principal, c'est-à-dire l’Etat, par son représentant, dans la configuration actuelle, la ministre de l’outremer, se trouve en terrain favorable avec l’un des investigateurs, le nouveau Président de Région.
En effet, sa première décision a été de rencontrer une partie du Conseil Régional en excluant l’opposition. La défense des intérêts de la Guyane commence plutôt mal. Cela ressemble à un petit jeu entre ultramarins, bien plus qu’à une préoccupation étatique. La dimension solennelle de la mission apparaît bien en deçà de ce qu’elle aurait dû être. Pourtant, cet outil en principe hautement politique va conditionner l’avenir économique, culturel, artistique et social de la Guyane. Les patients, c'est-à-dire les acteurs économiques, sociaux, culturels, artistiques, en fait, la population risque de faire les frais de ces apprentis sorciers de l’organisation institutionnelle.
S’il n’est jamais bien perçu de faire la comparaison entre des événements dramatiques touchant les êtres humains, au risque de choquer, car il n’y a pas de hiérarchie dans la souffrance, il ne serait pas sain que la Guyane par cet « essai clinique » soit un cobaye qui ne se relève plus de cette expérience.
Ceux qui sont soucieux de leur avenir et qui sont désireux de trouver une place en rapport avec leurs compétences dans la société guyanaise ont du souci à se faire à moyen terme. Il apparaît, par ailleurs, quasiment certain que de lourds handicaps attendent la Guyane sur le long terme.
L’histoire retiendra le jeu des différents acteurs de cette année 2010 du mois de janvier qui marque le début de la fin de la première décade de ce troisième millénaire. Elle enregistrera que le monde était en marche lorsque les Etats-Unis s’émancipaient d’un certain désordre philosophique avec l’avènement de Barack OBAMA et qu’en Guyane certains ordonnaient de s’émanciper de la liberté pour s’élever en statue de la subordination.