Volontairement, je ne me suis pas exprimé plus tôt sur le sujet pour éviter de mettre le feu aux poudres. Le temps me paraît propice et je m’exprime avant que les vœux de nouvel an, réflex routinier, ne viennent nous transporter vers un monde irréel où, tous nous aurions sniffé des substances psychotropes.
A force d’immobilisme, la situation à Kourou a fini par exaspérer au point d’interdire la circulation à partir d’une certaine heure à une catégorie de personnes en l’occurrence des mineurs de moins de 16 ans. C’est une décision grave. Il faut espérer que demain ce ne soit pas les femmes et après-demain les personnes « trop engagées » politiquement. C’est donc l’état de siège à Kourou. L’histoire nous revient comme un effet boomerang. Lors de la seconde guerre mondiale, les allemands, occupant une partie du territoire hexagonal impose un couvre-feu. Pendant la bataille d’Alger, la France met en place un couvre-feu. Oui, J’exagère… C’est volontaire pour montrer la gravité de la situation et comment en temps de paix on peut s’accommoder de dispositions exceptionnelles. Certains y sont très favorables surtout s’ils ont plus de seize ans, leur liberté est intacte. D’autres le sont moins mais se taisent, c’est plus simple, le courage, vous comprenez, est une vertu… La société s’est plutôt accommodée au mensonge, à l’hypocrisie, à l’imposture, à l’illusion, ces vices qui la caractérisent.
Le recours à presque la loi martiale est bien la conséquence de la mystification d’une société Kouroucienne dite ville spatiale. Des incivilités à ce niveau ont forcément une source quand bien même rien ne doit justifier la violence. Mais, il y a des violences qui ne sont pas directement physiques qui engendrent des traumatismes conséquents. Certains refuseront de l’admettre, néanmoins, l’état de la société Kouroucienne est bien la conséquence de quelque chose… L’injustice sociale, les blessures de l’esprit, le choc de culture, les meurtrissures de la chair sont des états qui nourrissent la révolte et génèrent les actes d’incivilité graves. Il faut donc se pencher sur les causes de cette violence et ne pas se contenter d’un couvre-feu qui n’est que l’expression de la faillite de la société convenue comme démocratique. Cette disposition ne peut être considérée que comme provisoire, il s’agit d’un répit qu’il faut utiliser à bon escient.
Kourou c’est une histoire dont on ne peut pas s’asseoir dessus. Ce sont les expropriations de Malmanoury, c’est la création de la ville spatiale à l’écart du bourg resté longtemps sorte de bidonville de la commune, elle a été pendant longtemps, dans la ville spatiale même, les quartiers d’ingénieurs, de techniciens et d’ouvriers. L’avènement du Maire de Kourou actuel qui a donné sous ses mandatures de la dignité au bourg par les investissements qu'il a réalisé aurait dû être accompagné de la création d’un commissariat de police.
La configuration psychologique de la ville de Kourou justifie plus que les villes de Matoury et de Rémire-Montjoly un commissariat. Force est d’admettre qu’il s’agit de deux métiers différents entre le corps des gendarmes et celui des policiers. Les gendarmes doivent gérer leur isolement par rapport à la ville du seul fait qu’ils sont des militaires et qu’ils vivent dans les casernes. Leurs sorties s’appréhendent consciemment ou non à de la répression. Les policiers sont quant à eux introduits dans la ville. La nature de leur fonction est beaucoup plus adaptée à l’urbanisation de la commune. Ils peuvent mieux accompagner la politique de la ville du maire (peu importe son étiquette politique). Leur présence dans la ville est automatiquement perçue, à tort ou à raison, comme de la prévention – répression. La police municipale n’a pas les habilitations qu’il faut pour être efficace à ce niveau.
Il importe de noter par ailleurs, que la réhabilitation du bourg fait émerger des frustrations liées au choc de culture et produit l’incompréhension entre les habitants. Cet état de fait vient rendre encore plus complexe la problématique du mieux vivre ensemble.
La jeunesse d’un pays ne peut en aucun cas représenter un handicap pour la société. La stigmatiser c’est reconnaître son propre échec. Il est donc temps de trouver des solutions fiables adaptées à notre réalité que d’importer des types d’organisations qui ne sont d’aucune efficacité pour la commune. La réalité des communes de Guyane n’a quasiment rien à voir avec celle des communes de l’hexagone. Les réponses doivent être intelligentes et surtout avoir comme objectif la sérénité de la ville, le respect des uns et des autres, la liberté pour tous.