Le carburant fait encore parler de lui en Guyane. Cette fois-ci, il ne s’agit pas des consommateurs à la pompe mais, des gérants de stations-services. Celui qui mène le mouvement est un ancien cadre de Rubis-Antilles Guyane. Il faut croire qu’il est en situation difficile pour ameuter tous les autres gérants alors que dans l’affaire « Balisiers Carbu », il demandait la désolidarisation avec la gérante. Pour cause, ses anciens patrons lui ont donné la clef de la station retirée manu-militari à la gérante en défiant les lois de la République.
Le chemin qu’il propose aux gérants de stations n’apparaît pas comme le plus légitime. Il s’agit d’un acte de guerre dont la raison est du type des « armes de destruction massive ». Le problème est ailleurs. On peut s’en rendre compte si l’on veut être objectif en décortiquant l’itinéraire du carburant depuis l’achat du Brent jusqu’à la consommation finale. Il est surprenant que ce meneur n’ait pas mis autant de zèle pour affronter les compagnies pétrolières.
La Sara est le seul raffineur qui fournit du carburant en Guyane. Autrement dit, indépendamment des enseignes, le carburant est le même. Il n’y a donc pas de produits concurrents. Il est utile de rappeler que la Sara a été mise en place sous le Général de Gaulle (UDR) pour garantir la pseudo indépendance énergétique des Antilles. Remarquons que l’on n’a jamais trouvé de pétrole dans la ZEE de la Martinique. Dans ce cas de figure cette activité en Martinique relève du secteur secondaire sans que la ressource elle-même qui appartient au secteur primaire puisse exister. Quid de l’indépendance énergétique. A l’époque du Général de Gaulle elle n’était qu’une allégorie.
Je ne reviendrai pas sur ce que j’ai déjà développé dans les articles précédents. Je soulèverai quelques points cruciaux qui vous permettront de vous faire une opinion et d’éviter d’être manipulés. Le Ministre des Outremers peut s’il le veut mettre un terme à ces défiances qui sur le territoire de la Guyane donnent le sentiment peut être à tort que la République a perdu un de ses piliers à savoir le pouvoir judiciaire tant certaines compagnies pétrolières se croient au-dessus des lois.
Je tenterai de trouver comment et par quelle société le Brent arrive à la Sara en Martinique puis par quelle société et comment le carburant raffiné arrive à la Sara en Guyane. Il y a ici également une certaine opacité à lever.
Aujourd’hui, il y a trois enseignes en Guyane : Vito, Bamyrag-Total, Sol. Rubis SAS propriétaire de l’enseigne Vito a racheté les stations Texaco et pour éviter une situation de déséquilibre, elle a été contrainte par la Direction de la concurrence de céder trois stations à la société Sol. Les points sur lesquels les gérants de stations devraient se pencher sont prioritairement les suivants :
Les contrats. Ils ne sont pas des contrats de partenariats mais des contrats de subordination sans aucune rémunération de base. Ces contrats sont de type unilatéral (oxymore) donc contraire au droit. D'autre part, l’on ne peut se contenter de dire que c’est à prendre ou à laisser. Ce serait un sophisme qui défierait l’esprit républicain et le sens du droit d'autant qu'il s'agit de sites classés risque Seveso 2. La nature du contrat génère des coûts qui pénalisent les Gérants.
L’intermédiation des compagnies pétrolières : A partir du moment où le carburant est identique il apparaît inutile de passer par les enseignes. Cette procédure soulève beaucoup d’interrogations. La première est la situation de soumission du gérant face au monopole qui naît de cette situation. En cas de difficulté passagère de trésorerie la compagnie peut aggraver la situation en faisant justice elle-même surtout si le gérant n’est pas docile et cela, en dépit des procédures juridiques de sauvegarde des entreprises commerciales. Le deuxième point, Le gérant de station passe une commande de carburant à la compagnie dont il a l’enseigne. Cette dernière n’a aucune structure de stockage. Elle passe à son tour commande à la Sara et la société TSO qui travaille pour toutes les enseignes livre directement le carburant. Il faut noter que le gérant de station n’a aucun contrôle sur la quantité livrée puisqu’il n’est pas le client de la Sara. On peut légitimement se poser la question de savoir si la commande passée par le gérant est bien répercutée par la compagnie à la Sara. On pourrait imaginer et ce ne serait pas stupide qu’une commande passée à la compagnie à hauteur de 4000 litres par exemple soit répercutée à la Sara à hauteur de 3700 litres, ce qui donnerait un écart de 300 litres supportés par le gérant. Lorsque l’on sait par ailleurs que les véhicules qui livrent le carburant ne sont pas équipés de compteur on comprend les difficultés que rencontrent certains gérants surtout s’ils ont de la personnalité.
On peut également imaginer le poids financier que représente la compagnie pétrolière face au banquier dans ce type de procédure. Elle collecte un revenu issu de tous ses clients entre autres locataire-gérant. Par suite, elle peut imposer subrepticement à la banque un désengagement financier avec un des gérants qui ne lui revient pas. On se trouve ainsi face à la loi du plus fort par comparaison avec l’importance du compte de dépôt de chacun.
Au passage, ces compagnies pétrolières prennent 9cts par litre de carburant. Rien ne justifie ce type d’opération pour les compagnies pétrolières dans la configuration de la Guyane. Elles devraient se contenter de percevoir leurs loyers de location gérance. Ainsi la remise en cause des 9cts conduirait à proposer 3cts supplémentaire par litre vendu à la Sara pour gérer les commandes de carburant de toutes les stations. Les gérants de station pourraient obtenir le centime qu’il réclame et le prix à la pompe pourrait baisser de 5 cts.
Coûts financiers: Ce dernier point n’est également pas négligeable. Alors que les gérants de station ont une marge de 10 cts par litre vendu, ils supportent seuls les commissions bancaires sur les mouvements de fonds assis sur le prix à la pompe et également les commissions sur les cartes bancaires car, ils sont les collecteurs de fin de chaîne. Une part de ces frais devrait être supportée par les autres acteurs de la structure de prix du carburant.
Faire pression sur la Préfecture pour obtenir 1ct supplémentaire c’est nier le vrai problème posé par les compagnies pétrolières qui se trouvent à tous les niveaux stratégiques de la chaîne de carburant, c’est demander une augmentation à la pompe de 1 ct par litre ou demander une baisse équivalente de la taxe or, le pétrole est un bien collectif qui doit contribuer à l’amélioration des conditions de vie de tous nos concitoyens.