D'aucuns ont longtemps pensé que la ville, avec le consentement implicite ou explicite de ses membres, impose ses règles à tous sans tenir compte du rang social, de l'origine et de la couleur de peau. Ainsi, au-delà de 22 heures le bruit est considéré comme du tapage nocturne qui est sanctionné, peu importe que l'on soit médecin ou ouvrier spécialisé, noir ou blanc. Les règles d'hygiène sont les mêmes pour tous les administrés indépendamment de leur croyance. L'enlèvement des ordures ménagères n'est rendu possible que grâce à l'effort collectif. Catholique ou Protestant, Musulman ou Indouiste, Athée ou non, le service est le même pour tous. Le niveau de liberté est également partagé, qu'importe la représentation du sujet. Il est rendu possible par ce que la liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres. C'est une liberté constitutionnelle. Les règles de circulation sont identiques pour tous les usagers de la voie publique. Tout manquement à ces règles induit une sanction. Dans ces conditions, on doit admettre que la ville n'est pas la jungle, elle n'est pas le lieu du règne du plus fort, ni l'endroit où c'est la loi de celui qui crie le plus fort. La ville est un espace ordonné où l'effort de chacun débouche sur une liberté collective plus grande. Elle est un système qui est censé permettre à chacun d'avoir la chance de s'en sortir en fonction de ses moyens. Pour garantir cette sérénité, il y a une organisation composée d'un Etat avec son arsenal destiné à protéger les citoyens, et un Maire qui est le premier magistrat de la ville. Il ne doit rien ignorer de ce qui se passe sur son territoire communal. Cela paraît si simple, si beau. C'était un rêve qui était devenu réalité.
La nouvelle réalité de la ville est devenue un cauchemar. A quoi sert la ville? L'impuissance de l'Etat conjuguée à l'absence de vision politique de certains maires entraînent certaines villes de Guyane vers le déclin. Celui-ci commence avec une sorte de permissivité et se termine dans le précipice de l'horreur. Ce sont des gens qui ne respectent pas le voisinage et qui hurlent comme des limbiques. D'autres qui prennent possession de l'espace public et qui se mettent autour d'une table pour jouer aux cartes, aux dominos etc. à n'importe quelle heure de la nuit. Des véhicules qui circulent en ville avec des décibels à vous crever les tympans. Des ghettos sans sanitaire qui posent le problème de santé publique et qui servent, par ailleurs, à toute sorte de trafics; drogue, prostitution. Ce laisser-faire crée chaque jour de nouveaux adeptes à l'incivisme, à la délinquance car, la voie est de plus en plus libre et le sentiment d'impunité de plus en plus grand. Personne n'ose dire quoi que ce soit. La peur envahit les citoyens, ils se taisent. Ils préfèrent déménager et laisser la place aux bandits, aux trafiquants. Ils n'osent même plus appeler les agents de police. Ils sont devenus sourds et muets à force de voir l'irrespect à l'encontre des forces de l'ordre. Visitez Cayenne et vous trouverez la folie humaine. Rendez-vous à Copaya II à Matoury et vous trouverez la zone de non-droit.
Dîtes-nous Messieurs les représentants de l'Etat, dîtes-nous Messieurs les Maires, dîtes-nous vite si vous êtes capable de mettre un terme à cette situation. Laissez tomber les viaducs, abandonnez vos projets démesurés et dîtes-nous si la ville est devenue une jungle pour que nous puissions vous ôter des mains notre destin. Dîtes le nous vite pour que nous fassions comme eux. Ce sont les règles que nous respectons qui nous mettent en situation d'infériorité. Elles font notre malheur. Si la ville est synonyme de jungle alors, libérez-nous des chaînes du civisme et nous trouverons notre bonheur.