Il y a quelques mois, en une journée, le 28 mars 2017, la Guyane entrait dans l’Histoire par les canaux médiatiques internationaux et les réseaux sociaux. Plus de 50 000 personnes, sur une population évaluée officiellement à 252 338 habitants, étaient descendues dans les rues dans les principales villes comme Cayenne, Saint-Laurent du Maroni, Kourou, pour exprimer leur ras-le-bol de la gouvernance actuelle et la négligence de l’État à leur encontre. C’est près de 20% de la population qui s’est mobilisé. Sur la détermination et sur le fond de la situation, c’était le SELMA guyanais. Cette imposante marche a légitimé « L'accord de Guyane » qui a été publié au journal officiel de la République. Au nom de la continuité de l’État, tous les Gouvernements successifs sont légalement liés à cet accord sauf à considérer que ce moment de démocratie et de légitimité est similaire à la période de Vichy et qu'il n'est qu'une parenthèse dans l'Histoire de la France Hexagonale. Cette prise de pouvoir momentané du peuple a relayé au rang de va-nu-pieds ceux qui prétendaient avoir la légitimité pour parler au nom du peuple. Le peuple les a fait taire au su et au vu du monde et il s’est exprimé. Par le biais du collectif «Pou La Gwiyann Dékolé », il a exigé un Congrès pour la mise en place de « L'accord de Guyane ». En conséquence, le mot d’ordre est tout simplement « L'accord de Guyane ». C’est la seule revendication légitime.
Nous apprenons que les convocations sont parties et que le Congrès prévoit un ordre du jour qui n’a rien à voir avec « L'Accord de Guyane ». Comment peut-on se moquer de la légitimité d’une telle marche… Il est important que la population sache que le Congrès est institutionnellement composé des Élus Territoriaux, des Maires et des parlementaires autrement dit tous les représentants institutionnels que les artisans de la marche imposante avaient demandé de se taire. Il est évident que le renouveau ne peut pas venir de ceux qui sont responsables de la situation et qui n’ont quasiment jamais respecté leurs engagements de campagne. Encore une fois, avec cet ordre du jour, ils ne veulent pas respecter la volonté du peuple.
La naïveté ou le narcissisme de certaines organisations les pousse à croire qu’elles peuvent faire quelque chose pour modifier l’ordre du jour de cette réunion appelée Congrès. Elles ne mesurent pas que par leur présence, elles vont contribuer à donner le sentiment que le Congrès a été une réussite, elles ne se rendent pas compte qu’elles vont participer à la création d’un pseudo espoir qui va encore ruiner les aspirations du peuple.
Avec le Parti Progressiste Guyanais, je ne crois pas que la solution puisse venir de cette entité dont la majorité des exécutifs locaux est à l’origine du délitement de la société soit directement, soit indirectement. De surcroît, pas un élu de ce Congrès n’a fait savoir publiquement qu’il s’opposait à cet ordre du jour qui est contraire aux aspirations du peuple. Toujours avec le Parti Progressiste Guyanais, je préconise le boycott de cette assemblée. Si nous sommes sérieux et que nous sommes sensibles à la souffrance de nos concitoyens, à l’absence de perspective pour la jeunesse dont nous avons une obligation morale et politique quant à leur avenir, alors, nous devons en parallèle à ce Congrès institutionnel faire un Congrès du peuple qui serait quelque part une Assemblée constituante pour l’avenir de notre territoire en prenant comme support « L'Accord de Guyane ». Aux yeux du peuple, nous serions plus crédibles, nous serions mieux entendus, la sympathie serait de notre côté. Cette Assemblée aurait au fur et à mesure plus de poids par l’intégration des nouveaux arrivants. Pour tenir compte de la densification progressive de cette assemblée de travail nous nous serions fixés un délai de 9 mois pour valider notre document. La méthode n’est pas le monopole des élus comme la géopolitique n’est pas le monopole de l’Etat. Penser la société, c’est penser à notre existence, se donner les moyens d’un autre paradigme que celui dont on est soumis actuellement qui nous humilie et nous traite comme des majeurs non émancipés.
Nous n’avons pas le droit de décevoir cette mobilisation historique du 28 mars 2017. Méfiez-vous de la colère froide, de la colère latente comme le volcan que l’on croît éteint et qui le jour de son réveil surprend et permet de constater sa force, sa puissance, son énergie lorsqu’il a tout ravagé sur son passage.