« C’est la responsabilité des intellectuels de dire la vérité et de dévoiler les mensonges » Noam Chomsky
Je vous propose une réflexion sur le thème « Entre loyauté et responsabilité » parce qu’il me semble que notre société et, j’ai presqu’envie de dire la civilisation dans laquelle nous évoluons, a oublié l’essentiel de ce qui fonde notre existence. Bien entendu, en disant cela, je ne prétends pas détenir la vérité. Mais à défaut, il nous faudrait alors, nous pencher sur les raisons de l’apparente incohérence de nos comportements et particulièrement de celle des dirigeants qui orientent notre vie.
Pour que la réflexion soit constructive je vous donne les définitions que j’ai retenues et à partir desquelles j’ai construit ma pensée. Bien entendu tout autre définition serait admise avec pour corollaire l’argumentaire qui l’accompagne.
« La loyauté est la fidélité manifestée par la conduite des engagements pris, aux respects de l’honneur et de la probité ». Elle est une vertu désirable
« La Responsabilité est l’obligation de répondre de certains de ses actes, d’être le garant de quelque chose, d’assumer ses promesses »
On constate qu’il y a un dénominateur commun qui est l’engagement accepté et respecté. Toutefois, dans le cas de la loyauté c’est le désir d’exécuter la parole donnée donc de réaliser ce qui est convenu. Dans le cas de la responsabilité, Il s’agit d’assumer des obligations et donc de réaliser les devoirs que l’on s’est imposé.
Quand bien même ces deux qualités se soutiennent mutuellement il importe de les distinguer. La loyauté, autrement dit la fidélité admet des tonalités à niveau différent selon qu’il s’agit de la loyauté envers soi en tant qu’être pensant ou envers les autres et selon qu’elle soit explicite ou implicite. La responsabilité est tout autre parce qu’elle a pour conséquence le devoir de réparer un préjudice causé par son fait. Bien sûr, les nuances dans la responsabilité ne sont pas du même ordre que la loyauté. Elle se décline sur des plans divers. Ainsi, on citerait la responsabilité politique, pénale, civile, environnementale etc.
Dans la logique dans laquelle je m’inscris, Je ne vois que la responsabilité morale en tant que valeur qui serait le vrai pendant de la loyauté. Elle est à mon sens celle qui fait grand défaut à la société car, on doit répondre de ses actes et de ses intentions devant sa conscience. Elle résiste interminablement à l’action. Elle ne peut être prescrite qu’avec la mort de sa propre conscience
Parmi toutes les formes de loyauté celle envers soi-même est essentielle c’est à dire la loyauté de ses propres convictions qui induit une cohérence de ses actions. Autrement dit, se soumettre à l’insuffisance, à la bêtise, aux vexations, à l’injustice, aux affronts alors que ce que l’on croît n’est pas ce que l’on vit est de la pure incohérence. La seule voie honnête qui donne du sens à l’existence est la rupture. Il est évident que dans un monde où le compromis n’a pas de limite, la perception de cette cohérence qui fait partie de la fidélité intime de l’être intellectuellement achevé n’est pas forcément audible à la masse lorsqu’on a pour objectif de la maintenir dans l’ignorance et qu’on lui enseigne implicitement que la corruption de ses idées est une vertu.
Il y a certes des sociétés plus complexes que d’autres qui, par le mouvement, par le dynamisme qu’elles génèrent vont engendrer des relations inédites. Pour autant ces nouvelles situations sont-elles de nature à remettre en cause le principe de loyauté. Par ce questionnement, on introduit la notion de l’altération des principes. Il me semble que le problème n’est pas l’altération en tant que telle mais, l’intensité de cette altération. Si l’on admet que la loyauté est un principe qui donne du sens à l’existence, elle ne peut pas fluctuer au gré des transformations au sein de la société, elle doit au contraire conditionner la transformation de la société. Sinon, l’on est dans la corruption de ses principes et la déloyauté, voire pire la trahison devient la vertu majeure de l’organisation sociétale.
Par suite, dans le contexte permissif dans lequel on évolue il me semble de plus en plus important avant de donner sa parole de bien appréhender la nature de l’échange c'est-à-dire être sûr que celui auquel on va accorder sa loyauté est lui-même fidèle à ses engagements. Dans cette configuration la responsabilité morale réciproque est engagée.
L’exemple de la Ministre de la Justice, Garde des sceaux peut être appréhendé sous l’angle de cette réflexion. Elle a exprimé à quelques reprises ses désaccords. Elle a certainement considéré que ceux-ci, tout en altérant ses principes ne les corrompaient pas au point de générer la rupture. A partir du moment où elle a considéré que la limite était atteinte il était de son devoir, donc de sa responsabilité de provoquer la rupture. La question de la déloyauté ne se pose pas à travers elle mais du côté de ceux qui n’ont pas été loyaux envers les fondements de leur idéologie. Bien sûr ces propos n’engagent que moi. Je me réfère à un exemple qui émane d’une interview de la représentante du syndicat USM qui, à plusieurs reprises indiquait que la Garde des Sceaux cristallisait tant de choses envers elle que cela rejaillissait sur l’Institution et que ces derniers mois elle perdait tous les arbitrages. Il y a une lecture multiple de cet aveu et la question de la loyauté implicite est posée sur les arbitrages. Par ailleurs, il manque une précision sur les éléments de la cristallisation. serait-ce morphologique? Il faut en tirer les conséquences constitutionnelles.
Cette loyauté envers les autres de manière implicite vaut dans tous les rapports au sein de la société et c’est peut-être cela qui a disparu avec la permissivité de l’organisation sociale. Y a-t-il loyauté entre employeurs et employés dans l’organisation économique de la société ? Entre producteurs et consommateurs ? Entre les élus et le peuple ? Entre certains délégués syndicaux et les salariés qu'ils sont censés défendre ? On pourrait faire ce constat dans nombre de corps de métiers. Doit-on penser que la loyauté implicite ou explicite qui constituait la base de l’organisation sociale et qui en faisait sa cohérence générait autant l’ennui pour que l’on soit aujourd’hui à ce niveau de déloyauté qui semble animer nos sociétés dites modernes. Les exemples pleuvent dans ce monde dit moderne, Equipe de France avec la «sextape», Equipe gouvernementale, la religion et ses préceptes bafoués tant sur le plan exotérique que sur celui de l’ésotérisme, certains francs-maçons avec la philosophie maçonnique.
Le manque de pratique de la loyauté est évident dans cette civilisation et explique en grande partie le délitement des sociétés modernes et son corollaire, l’ignorance et la pauvreté.